La FEF, monopole de la représentativité étudiante… ou pas!

Par Simon Liegeois et Wiktoria Ewa Wojslawowicz

Le lundi 1 novembre, nous apprenions avec stupéfaction certes, mais beaucoup de satisfaction, la désaffiliation du Bureau des Étudiants Administrateurs (BEA), conseil étudiant de l’ULB, de la Fédération des Étudiants Francophones (FEF). Si cette décision a pu s’avérer surprenante pour de nombreux étudiants, elle résulte néanmoins d’un système de représentativité dépassé, voire sclérosé au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Qu’en est-il réellement ?

Comment fonctionnent les conseils étudiants et les organisations représentatives communautaires dans l’enseignement supérieur ?

 

Pour comprendre l’enjeu d’une telle décision de désaffiliation de la FEF, il est important d’expliquer pour commencer le fonctionnement d’un conseil étudiant et d’une organisation représentative communautaire (ORC), ainsi que le rôle de ces instances dans la représentativité des étudiants de l’enseignement supérieur.

D’une part, le conseil étudiant est une instance présente dans chaque établissement supérieur. Pour qu’il puisse opérer, il doit se composer d’au moins sept membres élus lors des élections pour lesquelles les étudiants de l’université sont invités à voter. Parmi les sept membres élus, chaque faculté ou domaine d’étude devra avoir un représentant.

Ainsi, ces élections estudiantines mènent à la réunion des étudiants de première année jusqu’à la troisième année du bachelier autour du conseil étudiant. Dans le cas d’une démission d’un membre, celui-ci est remplacé par son suppléant. Si l’un des étudiants membre du conseil perd sa qualité d’étudiant régulièrement inscrit, il sera automatiquement considéré comme étant démissionnaire. En pratique, le conseil étudiant doit communiquer la liste des représentants tant effectifs que suppléants à l’établissement d’enseignement supérieur au sein duquel il opère.

D’une autre part, les ORC agissent en tant qu’organisations représentatives des étudiants à l’échelle communautaire. Une ORC s’assure à représenter tous les étudiants inscrits dans l’enseignement supérieur en veillant à défendre et à promouvoir leurs intérêts, mais également, comme des associations telles Jeunes MR aspirent à le faire, de former des CRACS (Citoyens Responsables, Actifs, Critiques et Solidaires).

Les conseils étudiants dans les universités peuvent faire le choix de s’affilier à une ORC ou de garder leur indépendance. Pour qu’une ORC puisse exister, elle doit disposer de statuts qui respectent le décret et garantir le pluralisme politique et philosophique au sein de sa structure. Elle doit également représenter au moins 15% des étudiants inscrits dans l’enseignement supérieur, et ce, dans au moins trois provinces. Si un conseil étudiant décide de s’affilier

Rétrospective sur la FEF et l’Unécof

 

La FEF a été créée en 1973 afin de représenter les étudiants francophones de Belgique. L’Unécof est quant à elle, née en 1996, et issue du Bureau des étudiants administrateurs de l’ULB, du Conseil des étudiants de la Haute École Francisco Ferrer et des étudiants de la Haute École Robert Schuman. À l’époque, elle se revendiquait pluraliste et représentative du monde étudiant dans toute sa diversité.

Lorsque le décret participation a été signé en 2012, la FEF (Fédération des Étudiants Francophones) et l’Unécof (Union des Étudiants de la Communauté française) étaient les deux organisations majeures qui représentaient les étudiants au sein de la Communauté française (actuelle Fédération Wallonie-Bruxelles). Bien qu’une collaboration entre les deux organisations aurait pu sembler alléchante, celles-ci nont pas toujours privilégié les mêmes moyens afin de défendre les intérêts des étudiants.  En ce sens, la FEF s’est vue reprocher des méthodes militantes contreproductives sur des dossiers clés, mais également, sa proximité avec le PTB et les jeunesses militantes communistes telles le COMAC. À titre d’exemple, le président du parlement interne de la FEF a été contraint en 2011 de démissionner car celui-ci exerçait un autre mandat pour le PTB.

L’Unécof, quant à elle, ne parvenait pas à représenter suffisamment d’étudiants en plus d’endosser un double rôle lourd à porter. En effet, celle-ci, en plus de son statut d’ORC était également reconnue comme OJ (Organisation de Jeunesse). Ce poids l’a finalement conduite vers sa fin en 2019, laissant la FEF seule pour défendre les intérêts des étudiants.

Où est la place du libéralisme ?

 

Bien que la FEF ait mis en place de nouvelles règles, notamment l’interdiction pour leurs représentants de cumuler des responsabilités avec un parti politique, ou encore de se présenter à des élections, le manque de pluralité et de représentativité ainsi que l’utilisation de moyens ne prenant pas en compte les diverses sensibilités, orientations philosophiques et politiques des étudiants, lui ont été reprochés de plus en plus au fil des années.

Si certains se sont étonnés de la décision du BEA de l’ULB de quitter la FEF, cette initiative du conseil étudiant de l’université s’inscrit pourtant dans un contexte plus large et complexe, laissant entrevoir un dysfonctionnement au sein de sa structure interne. Le manque de représentativité, ainsi que le manque de neutralité sont les points ayant mené vers la fin de collaboration avec celle-ci. Pourtant, la nécessité de rester fidèle avec sa vocation principale, qui est celle de représenter l’ensemble des étudiants de l’enseignement supérieur, n’a pas pour autant mis en exergue pour la FEF l’indispensabilité d’un discours davantage neutre et inclusif de toutes les orientations philosophiques et politiques qu’elle entend ironiquement défendre. L’hypocrisie est épinglée.

Cette problématique n’est pourtant pas récente. Les deux points abordés ci-dessus ont effectivement été recensés quelques années après la création de la FEF (1973).  Il va sans dire qu’au sein des différentes hautes-écoles et universités du royaume, les étudiants ne partagent pas une seule orientation politique, qui est dans ce cas, celle orientée à gauche. Le manque d’anticipation et de compréhension du besoin de représentativité de la moitié du spectre philosophique et politique des étudiants qu’elle représente se retrouve en ce sens au centre de cette dernière décision ayant secoué le paysage estudiantin. 


 

EN RÉSUMÉ…

Si la FEF se targue souvent d’être le seul organisme représentatif à faire porter la voix des étudiants en Fédération Wallonie-Bruxelles, nous remarquons surtout que leur système est usagé. Le spectre militant d’extrême-gauche n’inclut à fortiori pas l’ensemble des étudiants, ni les moyens employés pour parvenir à ses fins, tandis qu’ils se sont vus reprocher à de nombreuses reprises leur manque de travail et de nuance sur le fond de dossiers clés. Le monopole de la représentativité n’existe pas et la ligne militante de la FEF se fait surtout remarquer dans sa manière de communiquer : on ne retrouve ni débat, ni construction dans leur manière d’agir, car la place du débat n’existe pas au fondement-même de l’organisation